mardi 12 octobre 2010

Au pays des coupeurs de têtes

Tout juste revenu de mes pérégrinations dans la région de Mountain Province, je vous présente un aperçu de ses rizières en terrasses, classées au patrimoine mondial de L'UNESCO et connues ici sous le nom de huitième merveille du monde, mais aussi de sa culture pour le moins originale.

Les filleuls parrainés par Enfants du Mékong dans la région sont essentiellement regroupés à Bontoc et Bauko, et c'est donc un voyage en bus de 12h qui commence afin de me rendre sur place pour visiter les familles. Arrivée au niveau de la Cordillère, le bus entame son ascension sur une route étroite et accidentée qui longe des précipices vertigineux. Lorsque le bus passe à travers les nuages, le brouillard est si dense qu’il est difficile d’y voir à plus de trois mètres. Fort heureusement, il n'y a qu’un mètre d’écart entre le bus et le précipice! Les deux dernières heures de trajet offrent un magnifique panorama sur les rizières en forme d’amphithéâtre comme celles de Banaue.


Arrivée à Bontoc je décide de m’arrêter pour une petite visite du Musée de la ville qui parait-il vaut le détour. Et effectivement la surprise est totale. L'influence culturelle laissée par les ethnies des Igorots est encore très présente dans cette région. Et ces ethnies ont beaucoup fait parler d'eux, notamment à travers leur passe-temps favori : "Head Hunting" (traduisez, la chasse à la tête humaine). En fait les rivalités entres villages voisins étaient telles, qu'en réponse à un certain désir d'action et d'excitation, des expéditions guerrières étaient fréquemment organisées dans l'unique but de ramener le plus de têtes ennemies possibles. Pour les âmes sensibles, je vous conseille de passer les deux images qui suivent :



Le retour d'une chasse fructueuse est l'occasion pour le village de célébrer cet exploit par différents rites et cérémonies. Les meilleurs guerriers sont alors autorisés à se tatouer le visage. Evidemment ces expéditions ont été stoppées depuis une cinquantaine d'années mais quelques rivalités ethniques demeurent encore et deux victimes en ont fait les frais l'année dernière.

Mais c'est dans une toute autre ambiance que j'effectue mes treks dans les montagnes pour rendre visite aux familles. Même si la responsable du programme de Bauko n'a pas manqué de me rappeler qu'il fallait que je fasse attention en croisant des paysans lors de mes randonnées. En ajoutant même un "maintenant tu sais pourquoi!".





Dans ces montagnes, les forêts de pins vous rappellent le doux parfum du midi. Ici les familles cultivent le riz (ça on pouvait s'en douter) mais aussi la cacahuète et, lorsqu'ils en ont les moyens, ils élèvent des poules et des cochons.




Un matin, j'apprends que deux hommes, ayant pris connaissance de ma présence ici, souhaiteraient s'entretenir avec moi. C'est ainsi que je découvre la principale préoccupation actuelle des habitants de la région. En fait une poignée de grandes compagnies minières semble s'intéresser de très près aux richesses minérales que pourrait receler le sol de la région. Mais les habitants voient ça d'un très mauvais oeil, surtout qu'ils observent déjà les effets des forages d'exploration sur la qualité de leur rivière. Le gouvernement philippin, quant à lui, y voit déjà une importante source de revenus et a donc déjà commencé à envoyer l'armée pour protéger les sites d'exploration. Ces hommes m'expliquent que leur travail de sensibilisation de l'opinion publique a déjà bien avancé et qu'ils ne sont pas prêts à en rester là. L'un d'eux m'affirme même que s'il le faut, il est prêt à engager une lutte armée pour protéger ses montagnes. Alors quand on connaît leur passé, on se doute que la situation est assez mal engagée. Le pire dans tout ça c'est qu'une des compagnies est française! A ce moment là, je ne faisais donc pas trop le fier... 


Pour terminer cette article sur une note un peu plus festive, je vous propose quelques photos d'un mariage entre un suisse et une philippine, à Bontoc, durant lequel je me suis gentiment incrusté jusqu'à la table des invités pour pouvoir assister, aux premières loges, aux différentes danses ethniques! De toute façon il parait qu'ici, si tu connais un invité tu peux venir sans problème t'installer à une table. Quand on pense qu'en France le plan de table est un vrai casse-tête...






Pour la petite histoire, l'influence du conseil des vieux du village appelé "Ato" est encore très forte. C'est de là qu'émanent les décisions importantes du village. Le respect des aînées est tel que seules ces grand-mères qui apparaissent sur les photos ont encore de l'autorité sur les jeunes du village. A Bontoc, par exemple, les policiers sont incapables de disperser les adolescents qui boivent dans les rues de la ville le soir. Mais si une de ces grand-mères leurs demande de rentrer chez eux, pas un seul ne désobéira...

3 commentaires:

Chi-Tseu a dit…

Mais, mais, il a fait patte chaude le garçon!!!!!!!!!!!!! Elles sont sublimes ces rizières....

Aurèle a dit…

Mais oui on dirait bien !!
J'ai trop pensé à notre petite virée dans les rizières en Chine à ce moment là. J'étais complètement pommé! D'ailleurs c'est quoi déjà votre blague avec Harold pour le coup du chemin qui partait dans les montagnes ?

Chi-Tseu a dit…

Hahaha (souvenir souvenir)!
Moi je me souviens d'une autre balade et du choix cornélien entre le chemin goudronné à droite où il y a écrit sur un panneau fluo clignotant "c'est par ici" et le petit chemin de gauche boueux avec des ornières où un panneau en forme de tête de mort indique "attention danger de mort"... Aurèle a dit: "Tiens, si on prenait à gauche! J'ai été scout!!".....
Sinon, je ne vois pas pour la blague...

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